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Question de Mme Agnès Evren (Paris - Les Républicains) publiée le 15/02/2024

Mme Agnès Evren attire l'attention de Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du numérique sur les engagements pris en matière de régulation de l'accès des jeunes aux écrans, et en particulier aux réseaux sociaux les plus addictifs à l'instar de Tik Tok.
La gravité de la situation a déjà été établie : la surexposition aux écrans et certains usages des réseaux sociaux constituent désormais un fléau majeur pour la santé mentale des enfants. Une commission d'enquête sénatoriale et plusieurs études, dont deux rapports d'Amnesty International, ont conclu aux nombreuses conséquences néfastes de Tik Tok en particulier, et ce principalement sur les jeunes les plus fragiles, engendrant addiction, dépression, automutilation, voire pire.
Au-delà de l'enjeu prioritaire de santé publique, c'est plus largement l'avenir de notre modèle de société qui est remis en question, à l'heure où la surexposition à ces plateformes addictives cause tout à la fois des troubles de la concentration et de l'apprentissage, la banalisation de contenus de plus en plus sexistes et un recul de l'esprit critique.
Certaines solutions permettraient de limiter l'ampleur du désastre, à savoir l'interdiction de Tik Tok et la limitation de l'exposition aux écrans et aux réseaux sociaux pour les plus jeunes.
Il est urgent d'agir, au niveau national mais aussi au niveau européen, échelon essentiel notamment pour l'interdiction de cette plateforme.
Elle lui demande donc de préciser si un calendrier et un plan d'action pour envisager l'interdiction de Tik Tok et une limitation effective de l'exposition aux contenus nocifs en-dessous d'un certain âge ont été établis par le Gouvernement. Elle lui demande par ailleurs quels outils pourraient être mis en place pour faire respecter de telles mesures.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé du numérique publiée le 08/03/2024

Réponse apportée en séance publique le 07/03/2024

M. le président. La parole est à Mme Agnès Evren, auteure de la question n° 1104, adressée à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du numérique.

Mme Agnès Evren. À plusieurs reprises depuis le mois de janvier, l'exécutif s'est dit inquiet de l'impact de la surexposition aux écrans sur la santé mentale de nos enfants.

Une commission d'enquête sénatoriale et plusieurs études, dont deux rapports d'Amnesty International, ont conclu aux nombreuses conséquences néfastes de TikTok : troubles du développement cognitif, anxiété, troubles de l'attention, aggravation des tendances dépressives, etc.

D'ailleurs, depuis des années, les amendes pour non-protection des données des mineurs par cette plateforme se succèdent aux États-Unis, aux Pays-Bas, au Royaume-Uni, dans l'Union européenne. Des études scientifiques à la commission d'enquête sénatoriale, la sonnette d'alarme a été tirée à de nombreuses reprises.

Au mois de janvier dernier, un comité d'experts a été missionné par le Gouvernement. Nous attendons leurs conclusions de manière imminente.

Pourtant, nous savons qu'il existe déjà des solutions. Certaines ont d'ailleurs été évoquées jusqu'au sein de l'exécutif, notamment la régulation de l'usage des écrans et l'interdiction effective de TikTok.

Madame la secrétaire d'État, il est urgent d'agir. Pouvez-vous nous présenter l'état des réflexions et les premières pistes envisagées par le comité d'experts ? Allez-vous vous battre pour imposer ce sujet à l'échelon européen, puisque la France ne peut pas interdire ou bloquer seule des plateformes ? De quels outils notre pays dispose-t-il pour faire respecter des mesures de blocage ou de limitation d'accès ? Enfin, qu'allez-vous faire pour former les adultes, qui, souvent, n'ont pas les moyens d'apprendre aux enfants un bon usage du numérique ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Marina Ferrari, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du numérique. Madame la sénatrice Evren, votre question renvoie à une préoccupation majeure, celle de la santé mentale de nos enfants face à l'emprise croissante des réseaux sociaux et des écrans dans leur quotidien. Vous avez raison, il s'agit également d'une question de société.

Je tiens d'ailleurs à saluer les travaux de la commission d'enquête sénatoriale, dont le groupe Les Indépendants - République et Territoires a été à l'initiative. Elle a permis de tirer la sonnette d'alarme sur les effets néfastes d'une surexposition aux écrans.

En tant que secrétaire d'État chargé du numérique, en tant que mère aussi, je suis pleinement mobilisée sur le sujet.

Tout d'abord, à l'échelon européen, la France a été un fer de lance dans l'adoption du règlement européen sur les services numériques, dit Digital Services Act (DSA). À ce titre, TikTok a désormais - vous le savez - l'obligation d'analyser et de prendre les mesures nécessaires face au risque systémique susceptible d'avoir des conséquences négatives graves sur le bien-être physique et mental des mineurs.

Le DSA prévoit également l'audit des algorithmes qui gouvernent ces plateformes par des régulateurs ou des tiers comme des chercheurs, ce qui donne un droit de regard sur leur construction pour corriger, le cas échéant, les biais cognitifs qu'ils introduisent.

Ce texte produit déjà des effets. Je pense bien sûr à l'enquête que la Commission européenne a lancée sur la plateforme TikTok le 19 février dernier. À l'issue de celle-ci, si des manquements sont constatés, l'alternative pour le réseau social sera simple : les corriger ou bien s'exposer à de lourdes sanctions.

À l'échelon national, avec notamment la loi défendue par le député Bruno Studer, un contrôle a pu - vous le savez aussi - être mis en place sur le téléchargement des applications sur smartphone. Le Président de la République a par ailleurs lancé une commission « écrans » composée d'experts. Elle est chargée de remettre des propositions structurantes d'ici à la fin de ce mois ; nous les attendons. À ce stade, je n'ai pas encore les conclusions et je ne peux donc pas vous livrer les pistes qui sont explorées.

Toutefois, vous pouvez compter sur mon engagement plein et sur celui du Gouvernement pour une régulation responsable de nos réseaux sociaux et pour maintenir des discussions exigeantes avec ces acteurs également - vous avez raison - à l'échelon européen.

M. le président. La parole est à Mme Agnès Evren, pour la réplique.

Mme Agnès Evren. Le sujet est d'autant plus important que nous sommes à la veille de la Journée internationale des droits des femmes. Or nous constatons une sexualisation des réseaux sociaux. Quelles seront à l'avenir les relations entre les filles et les garçons quand on voit les propos sexistes qui sont tenus sur TikTok ?

J'aurais aimé que vous nous apportiez davantage de réponses concrètes pour nous rassurer. Mais j'ai compris que le comité d'experts n'avait pas pour l'instant encore établi d'orientations. C'est quelque peu décevant. Nous n'avons plus qu'à prendre notre mal en patience.

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